lundi 26 janvier 2015

La Cour des Comptes interpelle la cité de la musique

Par un référé, Didier Migaud premier président de la Cour des Comptes, adresse aux dirigeants de la cité de la musique des questions et recommandations.

Nous avons signalé au public, l'OPA hostile qu'a menée la cité de la musique contre la Salle Pleyel.
En tant que directeur général de Pleyel pendant la période concernée, il apparaît utile que nous complétions aujourd'hui les réponses données par la cité de la musique.

Sur la prise de contrôle de Pleyel :
le CDR sous le contrôle de Bruxelles en 1995 a ouvert candidature pour la reprise de Pleyel de 1998.
Bien que la mairie de Paris, comme le ministère de la culture aient figuré parmi les quelques dizaines de candidats, ce fut notre dossier qui fut choisi comme étant le mieux-disant culturel et financier.
Les statuts de 1995 de la cité de la musique ne permettaient pas à son directeur Laurent Bayle, de signer un contrat hors la zone géographique du Parc de la Villette.
Pourtant en 2006, la cité de la musique s'est invitée à Pleyel s'appuyant sur un contrat de location de 50 ans signé pendant la validité des statuts de 1995, et contraignant le Président de Pleyel, alors mis en examen (au même moment!) dans l'affaire Altran, à signer ce bail.
Il stipulait l'obligation du propriétaire à réaliser certains travaux pour 27 millions d'euros.
La cité de la musique a donc imposé ces travaux, les a contrôlés, sans appel d'offre de marché public, bien qu'étant une entité publique. Elle a imposé l'entreprise Bouygues, entreprise qui a ensuite construit la Philharmonie.
Clairement, la cité de la musique fût le maître d'ouvrage de ce chantier. Et quel chantier !

Sur la nature des travaux de Pleyel ordonnés par la cité de la musique :
Sans entrer dans des détails ennuyeux et sans polémique aucune, les travaux imposés ont eu deux buts :
- diminuer la volumétrie de la Salle Pleyel
- diminuer drastiquement le nombre de places
En effet, l'architecte de cette transformation, François Céria déclarait en 2006 sur le site Creargos : "le fond de la salle est avancé afin de réduire le volume de la salle et supprimer des sièges...moins de spectateurs et plus de volume général".
On se demande comment on peut avoir plus de volume général alors que l'on rapproche les murs de la salle de tous côtés et que l'on diminue la volumétrie !
En fait, la jauge réelle passe de 2380 places à 1750 places, soit 630 fauteuils en moins. Les salles attenantes Chopin et Debussy sont supprimées, soit 650 places.
En tout, 1280 places sont supprimées.
C'est un assassinat !
On aura donc construit la philharmonie pour 20 places de plus...20 places à 400 millions d'euros !
Laurent Bayle déclarait dans Paris Capitale de septembre 2006 : "le programme de Pleyel comblera d'aise les amoureux de la musique symphonique, car c'est à ce répertoire là que la Salle Pleyel est consacrée...Pleyel est un lieu qui doit avoir une identité forte sur la question de la redynamisation du répertoire symphonique...".
A la question : - les artistes non classiques vont-ils proposer des spectacles ?
Laurent Bayle répond : "non, car un auditorium n'est pas et ne doit pas être une salle de spectacle. Pleyel n'est ni l'Olympia ni le Zénith. Un auditorium c'est un monobloc dans lequel il ne doit y avoir d'obstacle entre vous et l'orchestre " (sic!).
La Cour des Comptes invoque des décisions incohérentes : "ces errements commencèrent par le refus d'acquérir l'immeuble Pleyel en 1998 et se poursuivent encore aujourd'hui avec la fermeture programmée de la Salle Pleyel aux concerts symphoniques et plus généralement, à la musique classique pour laquelle cette salle a été pourtant conçue et rénovée ".

Sur le sort de la Salle Pleyel :
Malgré la volonté de la C. de la M. d'anéantir la capacité de Pleyel à affronter l'avenir, la dépouillant de son public, de ses artistes, de sa programmation, pour les transporter à la porte de Pantin, la Salle Pleyel a un bel avenir car reposant sur une histoire prestigieuse qui ne peut s'éteindre, s'agissant du prestige de la France et du respect de la culture française.
Il est donc tout à fait possible de récupérer la jauge et les plans acoustiques qui ont fait sa réputation, car son implantation est dépourvue de nuisances du métro ou des périphériques, qui lui donne un atout unique pour la musique classique.

Sur la politique de l'offre au public :
La C.de la M. met en avant un public qui serait vieillissant... C'est inexact. On a pu le remarquer lors du concert à la mairie du 17ème "pour le maintien de la musique classique". Il y avait énormément de jeunes. D'autre part, dans ma fonction de directeur général, j'ai pu observer que les différentes couches de la société française y étaient représentées, bien que les places les plus chères soient occupées par des personnes plus âgées qu'aux balcons, ce qui somme-toute, est logique.
De plus, j'ai pu constater que les membres de l'association "pour la musique classique à Pleyel" résident à 70% en banlieue et que donc, l'argument de la C.de la M. consistant à expliquer que le public de Pleyel est situé à l'ouest parisien, ne tient pas.
Il n'est que de se reporter aux quelques 1.800 commentaires de la pétition sur internet pour comprendre que le public Pleyel tient, en vérité, à la qualité et à l'âme du lieu. Cette communauté qui représente par ses convictions la communauté musicale internationale, doit être respectée.
Oserait-on détruire Carnegie Hall, Musikverein, Concertgebouw ?

Sur le financement :
La Salle Pleyel créée en 1927 est une entreprise privée qui jusqu'en 2006, date d'arrivée de la C.de la M., n'a reçu aucune subvention publique. C'est le parfait modèle de l'entreprise privée au service du public, avec un prix de place souvent moins cher ou égal aux lieux publics subventionnés. Il n'est besoin de dire que Pleyel fut une chance pour Paris...
Les responsables de cette cacophonie administrative, sans doute envieux de ce modèle économique, mettront toute leur ardeur à le détruire, ce qui aura pour but la Philharmonie. Elle bénéficie à l'intérieur du parc de la C. de la M. d'un budget annuel de : 35 millions d'euros, plus 15 millions, plus pour l'Orchestre de Paris une dizaine de millions, ce qui fait 60 millions d'euros annuels de subventions publiques.
A t-on les moyens de financer une pareille opération alors que la Salle Pleyel ne coutait rien au contribuable...


Il est temps de rétablir les priorités nécessaires au maintien de la musique classique en France, et séparer les préoccupations électoralistes des nécessités inhérentes à un art fondateur de la culture française.

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